Muro de Roda en Aragon
MURO DE RODA
Histoire de la Casa Salinas de Sociat
- Altitude : 955 m
- Nom des Habitants : Mureño
- Nombre habitants : aucun
- Province : HuescaPays : Espagne
HISTOIRE :
L’ermite de San Bartolome atteste d’une présence au XI siècle. L’église paroissiale dédiée à la Asuncion de Nuestra Señora est de style Roman.
A l’intérieur, des peintures murales populaires du XVIII siècle résistent aux outrages du temps.
Muro de Roda se compose d’une douzaine d’aldeas, la plus part désertes et sauvages.
La Casa SALINAS de l’aldea Sociat berceau des Salinas et des Solanilla est à environ 1h00 de marche de l’église appelé ici El Castillo.
MADOZ :
Dans le Madoz de 1845 le village est décrit de la manière suivante:
- Climat : Froid mais sain et très aéré, se compose de 26 maisons, une bonne maison municipale avec sa prison et près d'elle au-dessus du coteau l'église paroissiale.
- Dans tous les quartiers , il y a des sources qui fournissent des eaux abondantes au habitants pour ses nécessités domestiques.
- Production : La principale est le vin, il y a aussi du blé, huile, des légumes et de bons fruits, un bétail à laine, on chasse le lapins et perdrix en abondance et on pêche barbeaux, truites et d'anguilles..... Il y a aussi un moulin à farine et un autre à d'huile.
- Contribution : 5430 reales ( en vigueur depuis 1848) soit 1360 pesetas ( en vigueur depuis 1868)soit 8 € d’aujourd’hui( depuis 2002)
La Casa Salinas de Sociat
Domingo Salinas est le patriarche de la maison en cette année de sa mort 1916, il est aussi Juez de Muro de Roda. La maison lui est parvenu par son père et son grand père eux aussi s’appelaient Domingo Salinas et étaient Propretario. La Casa Salinas était prospère et respectée dans le petit monde de La Fueva.
Domingo a 2 filles Mariana et Carmen. Mariana l’aînée, s’est mariée jeune environ 18 ans en 1885 avec Jose Solanilla de Mur à peine plus âgé qu’elle, lui aussi de Muro de Roda, mais noté Labrador.
Ils vécurent à la Casa Salinas qui demandait beaucoup de bras pour son exploitation.
De ce mariage naquirent 7 enfants dont Antonio (1885), Maria (1888), José (1893), Ororia (1896), Domingo (1897), Antonia (1898) et Ramon (1901). Maria, Ororia et Ramon mourront moins d’un an après leur naissance.
Les 3 enfants ci-dessous partirent pour la France et ne revinrent jamais vivre au pays.
Antonio est mon grand père maternel.
Jose ne parlait pas à son frère mais furent voisins toute leur vie en France
Antonia une fois mariée s’éloigna de ses frères belliqueux.
En 1902 Mariana meurt à 34 ans, laissant ses 7 enfants à la charge de José son mari, même si les 2 aînés participent déjà aux travaux.
L’éloignement de tout, la difficulté à gérer la situation, et surement la facilité poussent José le mari âgé de 43 ans à épouser le 16 Mai 1903 la sœur de sa femme, Carmen âgée de 25 ans.
Ils auront 6 enfants.
Domingo le patriarche meurt donc le 03 Avril 1916 à 77 ans. Sa fille Carmen et son beau-fils José sont auprès de lui avec leurs enfants.
Antonio l’ainé du premier lit qui était parti en 1911 travailler en France, revient au pays toujours célibataire. Refuse-t-il la succession ou en est-il spolié, ce qui est connu c’est qu’il ne veut pas rester en Espagne, il trouve la vie plus facile en France. ON lui fait rencontrer Ramona Sallan de Graus, alors âgée de 19 ans.Malgré cette rencontre il veut renter en France. Elle accepte à condition d’amener son pauvre père alors veuf.
Le mariage est célébré rapidement le 21 Juin 1916 à Graus. Ramona et Antonio sont aussitôt de retour en France à Pomerols (Hérault).
José son frère lui aussi partira en France, la date n’est pas connue. Il aura 2 enfants Georges et Valentine.
Antonia fera de même et vivra à Bessan (Hérault).
Trois enfants du premier mariage de Jose partiront donc en France, coïncidence ou problème avec la nouvelle femme de leur père... mais Domingo cinquième enfant du premier mariage reste là.
L’héritier de la maison est donc Domingo du premier mariage. Il a 20 ans.
1925 Domingo vient en France, définitivement ou pour la saison (?). Accidentellement, il meurt à Canet d’Aude(11) le 11 Février 1925 où il est enterré.
A cette époque, Jose et sa seconde épouse Carmen vivaient toujours à Sociat avec leur fille Carmen
Cités comme héritiers Antonio(mon grand-père) et son neveu Georges( au nom de son père José) reviennent à Muro de Roda pour régler la succession.
23/09/1925 Tous comparaissent devant le notaire de Boltaña où Carmen, fille du second lit, devient propriétaire. Il est précisé qu’elle projette de se marier avec Francisco Bardaji majeur de 19 ans et demi.
Carmen aura obligation de payer à chacun de ses Frères Antonio et Jose, 1150 pesetas en 5 délais égaux, le premier en Février 1926.
Carmen aura obligation de nourrir ses frères et sœurs célibataires Concha/Ines/Joaquin et Pilar.
02/10/1925 Carmen Solanilla Salinas se marie à Francisco Bardaji.
20/09/1962 Carmen fait de son fils Antonio son légataire universel.
D’après les documents copiés chez Carmen la légation est assortie de conditions :
- Les parents se réservent « durante su vida » l’administration des comptes.
- Les héritiers ont obligation absolue d’habiter dans la Casa avec les parents, pour lesquels ils doivent le respect et obligation alimentaire.
- Si l’héritier venait à éloigner sa famille de la Casa sans le consentement de ses parents ou du dernier vivant, plus de douze mois, il perdrait tous ses droits sur la Casa.
- L’héritier doit assistance à son frère célibataire Sénivaldo, jusqu’à son mariage, date à laquelle celui-ci perdra son droit sur la Casa.
- A ses 9 frères, l’héritier doit payer 25 pesetas en dédommagement.
Voici donc Antonio, heureux de terminer l’année 1962 plein d’espoirs et de projets.
A 57 ans, sa mère Carmen a estimé qu’il était temps pour elle de lui passer le relais. D’autant que Antonio s’est marié peu avant le 11 Août avec Christina une fille qui connaissait bien le pays car elle était vecino de Los Molinos. De plus, Christina apporta une dot confortable de Mil Pesetas.
La Mili (Service Militaire) terminée quelques mois plus tôt, Antonio aimait à se retrouver dans ses montagnes, le fusil en bandoulière entouré de ses chiens.
Nati la sœur cadette m’a raconté qu’elle était présente lors de cette soirée du 15 Octobre 1962.
Elle se souvenait de l’étrange sensation qu’elle éprouva ne voyant pas revenir Antonio alors que l’orage venait d’éclater. Dans ces collines proches de 1000 mètres d’altitude, le ciel se noirci et l’orage gronde en peu de temps.
Pris certainement dans une traque de quelque gibier, Antonio aura été surpris par l’orage. Son histoire s’arrêta ce jour là, foudroyé par un rayo (éclair) au milieu de ses terres aussi ingrates que fascinantes.
Ainsi donc, deux mois à peine après la fête du mariage, un mois à peine après avoir eu un nouveau maitre, la Casa se retrouve sans héritier pour la conduire.
Le destin de la Casa, aurait pu changer, et passer dans le patrimoine de Christina. Heureusement, l’attachement à cette maison et la prévoyance toute paysanne de Carmen, avaient fait que celle-ci avait mis une clause suspensive à l’héritage de son fils: La mort de celui-ci sans héritier.
L’affaire ne fut pourtant pas conclue en un tour de main, de nombreuses discussions durent certainement définir les termes de la cession des droits d’héritage de Christina.
Son frère Fernando, fut d’ailleurs témoin et partie prenante aux discussions.
C’est seulement le 25 Avril 1964 que l’affaire est close, Christina est repartie avec son frère à Los Molinos et Carmen se retrouve seule propriétaire de la Casa Salinas de Sociat.
Lors de mes pérégrinations Aragonaises, je suis passé par Los Molinos, et par hasard j’ai rencontré un homme âgé, du même âge et du même village que Christina, qui avait assisté à son mariage avec Antonio.
Il se souvenait de cette fête organisée à Sociat, la seule fois où il eut l’occasion d’y monter.
La messe fut célébrée à Los Molinos, dans une chapelle au bord de la route qui monte à San Victorian. D'après lui, Christina vivait à Lerida où elle s’est remariée.
Nous sommes donc en 1964, Carmen dirige la Casa dont l’avenir semble déjà bien sombre.
L’histoire ne dit pas si Senivaldo est toujours là, mais nous savons que c’est Francisco fils de Carmen et sa femme Mathilde qui montèrent à Sociat pour y vivre.
13 ans, ils tiendront 13 ans dans l’isolement devenu intolérable en cette fin de siècle.
Peu à peu, au fil des hivers, de la faillite de son exploitation, Carmen va se détacher de son bien le plus précieux.
En retraite à Boltana chez son fils Francisco et Mathilde, elle tentait d’oublier les malheurs vécus là-haut, mais ne manquait pas une occasion pour nous transmettre, au-delà des malheurs, l’amour de cette terre trop ingrate.
1 Août 1977, la Casa Salinas appartient désormais à Fortuno Joaquin vecino de Campo.
Avec elle, Carmen a vendu les terres adjacentes, soit 2,17 hectares.
Sources :
- Archivos historicos de la Provincia, Hueca,
- Registro de Propiedad, Boltaña,
- Entretien avec Carmen Solanilla Salinas, Antoinette Solanilla Sallan l’aînée de mes tantes,
- Journaux de voyages avec ma sœur Janine Boils de 1988 à 2000
Bernard Boils